En tant qu'avocat, lorsqu'un client ne paie pas les honoraires convenus , et que, malgré une démarche amiable, il ne souhaite toujours pas vous régler, c’est le signe que la voie contentieuse est à prendre . C’est le moment de saisir le bâtonnier pour demander l’ouverture d’une taxation des honoraires .
A noter que le début pratique de la procédure peut varier selon les modalités de saisine mises à disposition par le barreau où vous êtes inscrit.
Saisine du bâtonnier La procédure débute avec la saisine (gratuite) du bâtonnier. Tout au long de la procédure, que ce soit devant le bâtonnier, devant le premier président de la Cour d’appel ou devant la Cour de cassation, vous pouvez vous faire représenter.
Comment saisir le bâtonnier ? La réclamation doit se faire auprès du bâtonnier du lieu où vous vous trouvez par :
Lettre recommandée avec accusé de réception (LRAR). Lettre recommandée électronique (LRE eIDAS). Remise contre recepissé. Attention au délai de prescription : votre demande de taxation peut être rejetée pour cause de prescription au bout d’un délai de 2 ans pour des honoraires impayés par un particulier et 5 ans entre professionnels. Ce délai commence à courir à la fin de la mission confiée à l’avocat. La fin de la mission correspond soit à la fin du dossier soit au dessaisissement de l’avocat par le client. Datez donc bien la fin de votre mission.
Contenu de la réclamation La demande doit être explicite. Vous devez détailler les éléments suivants :
Identification du mandat donné par le client. identification du client Description de l'ensemble des tâches et actions entreprises dans le cadre de la défense de votre client. Vous serez amené à détailler précisément la convention d’honoraires. Mentionner les appels de provision non réglés et les relances faites. Mentionner le montant restant dû et les difficultés particulières Demande explicite de taxation des honoraires. Identification de son représentant si vous décidez d’y faire appel. Très important ! Considérez cette procédure comme l’une de celles dans laquelle vous vous engagez pour un client. Veillez donc à bien documenter chaque étape du traitement du dossier, que ce soit avec les preuves de relances, des appels de provision, ou tout autre documents.
Pièces à joindre Il est impératif de transmettre :
Une fiche de diligences dûment remplie (à demander au secrétariat de l’Ordre) La convention d’honoraires ou la décision d’aide juridictionnelle et la convention signée par le bâtonnier, ou convention d’honoraires contrat de protection juridique Les factures de provision La facture récapitulative obligatoire (art 11-7 du RIN) La mise en demeure de payer adressée au client La justification des actes effectués et les décisions rendues Les courriers échangés utiles à la demande de taxe à l’exception des correspondances confidentielles entre avocats Instruction du dossier par le bâtonnier Le bâtonnier accuse réception de la réclamation et précise que le délai d'instruction est de 4 mois , renouvelable une fois. Il informe également l’avocat du fait que s’il ne rend pas de décision dans ce délai, le demandeur pourra saisir le premier président de la Cour d’appel dans le délai d’un mois.
Le délai de 4 mois renouvelable court à partir de la réception de la LRAR ou de la remise du récépissé.
Il est renouvelable une fois sur décision motivée ; le renouvellement est notifié par LRAR ou LRE.
Le bâtonnier, un délégué (vice-bâtonnier ou membre du conseil de l'Ordre), ou un rapporteur (désigné sur une liste d’avocats expérimentés) examine le dossier.
Les parties sont convoquées pour une audience contradictoire , où elles peuvent exposer leurs arguments.
Si le défendeur ne retire pas son recommandé de convocation ou si le recommandé revient au secrétariat avec la mention « n’habite pas à l’adresse indiquée » ou « non réclamé retour à l’envoyeur », vous devrez le faire citer par acte extrajudiciaire à son dernier domicile connu. Le coût sera retenu au titre des frais et débours.
Quels sont les pouvoirs du bâtonnier ?
Fixer le montant des honoraires selon la convention ou en appliquant les critères de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 : la situation de fortune du client, la difficulté de l'affaire, les frais exposés par l'avocat, sa notoriété et ses diligences. Réduire les honoraires en cas de montant jugé excessif ; Condamner le client à payer les honoraires ; Ordonner un remboursement du client s'il y a un trop-perçu ; En menant à bien sa mission, le bâtonnier peut être amené à s’assurer que l'avocat n'a pas influencé le client à ses dépens.
La notification de la décision Une fois rendue, la décision est envoyée aux parties dans un délai de 15 jours par LRAR ou LRE, en mentionnant clairement les délais et modalités de recours.
En cas de non-décision à l’échéance du délai de 4 mois, ou 8 mois en cas de renouvellement, l'avocat doit saisir le premier président de la Cour d'appel.
Recours devant le premier président de la cour d'appel Les parties disposent d’un mois suivant la notification de la décision du bâtonnier pour former un recours devant le premier président de la cour d’appel dans le ressort de laquelle se trouve le barreau où l’avocat est inscrit.
Un point à connaître : si les parties n’ont pas été informées du délai d’un mois, la demande est recevable même en cas de dépassement de ce délai (Civ.1ère, 13 oct. 1999, n°06-16.847 ou Civ.2e, 9 oct.2008, n°06-16.847).
Le recours peut être formé par LRAR, LRE, ou via le RPVA depuis le 1er septembre 2020.
Le recours doit contenir les informations suivantes :
Identification de l'appelant et des parties adverses. Copie du jugement du bâtonnier contesté. Indication des motifs de recours (erreurs de procédure, montant excessif, etc.). Audience devant le premier président de la cour d'appel L’audience respecte elle aussi le principe du contradictoire. Le premier président peut :
Statuer directement sur le litige. Renvoyer l'affaire devant la Cour d'appel pour un examen approfondi. Il peut également :
Confirmer, infirmer ou annuler la décision du bâtonnier. Modérer les honoraires s'ils sont jugés excessifs. Pourvoi en cassation L’arrêt de Cour d’appel est susceptible de pourvoi dans un délai de 2 mois à compter de la notification.
Exécution provisoire L’exécution forcée de la décision du bâtonnier est possible dans deux situations :
1) Lorsqu’elle est à l’initiative du bâtonnier
La décision du bâtonnier peut être exécutoire même en cas de recours dans la limite d'un montant de 1 500 €.
Lorsque ce montant est plus important, le caractère exécutoire s’applique dans la limite du montant des honoraires sur lequel vous et votre client êtes tombés d’accord. Ce montant doit être expressément mentionné dans la décision.
Le premier président de la cour d'appel peut, en urgence et sans possibilité de recours, décider de :
suspendre l'application immédiate d'une décision si elle risque d'être annulée ou modifiée et si son exécution peut causer des conséquences très graves à l’une ou l’autre des parties ; rétablir l'application immédiate de la décision si elle a été suspendue, à condition que cela soit adapté à l'affaire et que cela n'entraîne pas de conséquences excessives. envers l’une des parties. 2) Lorsqu’elle est faite à la demande de l’avocat
Pour les honoraires supérieurs à 1 500 € ou si personne ne conteste les montants, le bâtonnier peut décider que sa décision sera immédiatement applicable si cela lui est demandé. Cela vaut même si votre client fait appel.
Le bâtonnier peut exiger des garanties réelles (nantissement, hypothèque, gage et antichrèse) ou personnelles pour s'assurer que l'argent pourra être remboursé si nécessaire. Sa décision devra spécifier la nature, l’étendue et les modalités de la garantie.
Le premier président de la cour d'appel peut, en urgence et sans possibilité de recours, décider de :
suspendre l'application immédiate de la décision si la loi l'interdit, s'il ya de bonnes raisons de penser que la décision pourrait être annulée, ou si son application causerait des conséquences graves ; rétablir l'application immédiate si elle a été suspendue ; ordonner l'application immédiate même si elle n'a pas été demandée ou si le bâtonnier a oublié de se prononcer à ce sujet. A savoir : vous ne pourrez pas demander d’exécution provisoire à la part des honoraires fixés en fonction du résultat obtenu ou du service rendu.
Améliorez vos processus de facturation et de recouvrement Une difficulté liée au règlement d’honoraires est l’occasion d’auditer ses pratiques :
mode de détermination du montant des honoraires (taux horaire, forfait, abonnement) ; modalités de facturation ; processus de recouvrement ; qualité de la communication avec les clients tout au long du suivi du dossier. Pour améliorer vos pratiques, nous vous recommandons les formations de Side quest :
Ressources :
Loi n° 2015-990 du 6 août 2015
Règlement Intérieur National de la profession d'avocat
Honoraires, FAQ, Barreau de Paris
Article 514-1 et s., Code de procédure civile
Service de la fixation des honoraires, Barreau de Paris
Comment procéder à la taxation des honoraires d’avocat ? , Youtube, Les juristes curieux, 5 avril 2024
Article 6, décret n° 2021-1322 du 11 octobre 2021 relatif à la procédure d'injonction de payer, aux décisions en matière de contestation des honoraires d'avocat et modifiant diverses dispositions de procédure civile
Articles 174 et s., décret n°91-1197 du 27 novembre 1991
Articles 514-3, 514-5 et 514-6, Code de procédure civile