En France, les collaborateurs libéraux représentent environ 30 % des avocats (40 % à Paris). Au sein des collaborateurs, 96 % d’entre eux sont sous statut avocat collaborateur libéral, contre 4 % d’avocats collaborateurs salariés.
La conclusion du contrat de collaboration : ce qu’il faut savoir
En France, les collaborateurs libéraux représentent environ 30 % des avocats (40 % à Paris). Au sein des collaborateurs, 96 % d’entre eux sont sous statut avocat collaborateur libéral, contre 4 % d’avocats collaborateurs salariés.
L’article 18, II de la loi n°2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises dispose que :
« La qualité de collaborateur libéral le membre non salarié d'une profession mentionnée au I qui, dans le cadre d'un contrat de collaboration libérale, exerce auprès d'un autre professionnel, personne physique ou personne morale, la même profession.
Le collaborateur libéral exerce son activité professionnelle en toute indépendance, sans lien de subordination. Il peut compléter sa formation et peut se constituer une clientèle personnelle. »
Ainsi, le contrat de collaboration libérale est fondée sur quatre principes :
- l’indépendance ;
- l’absence de lien de subordination ;
- la formation ;
- le développement de la clientèle personnelle.
L’article 14 du Règlement intérieur national de la profession d’avocats définit la collaboration libérale comme :
« un mode d'exercice professionnel exclusif de tout lien de subordination, par lequel un avocat consacre une partie de son activité au cabinet d'un ou plusieurs avocats. »
Par opposition, il ajoute que :
« La collaboration salariée est un mode d'exercice professionnel dans lequel il n'existe de lien de subordination que pour la détermination des conditions de travail. »
La nécessité d’un écrit
Le contrat de collaboration, ainsi que ses éventuels avenants, doivent obligatoirement être écrits, à peine de nullité.
Le Règlement intérieur du Barreau de Paris (RIBP) propose un modèle de contrat de collaboration en son annexe XI.
Les clauses du contrat de collaboration
Les clauses obligatoires
Les clauses relatives à la durée et les modalités d’exercice
- Si le contrat est à durée déterminée ou indéterminée. En cas de contrat de collaboration libérale à durée déterminée, le terme et, le cas échéant, les conditions de son renouvellement doivent être également précisées.
- La durée de la période d’essai, de maximum trois mois, renouvellement inclus.
- La durée des périodes de repos rémunérées pour le collaborateur libéral. Le repos doit être minimum de cinq semaines, mais le contrat peut prévoir des dispositions plus favorables pour le collaborateur.
- Les conditions de l’organisation matérielle du travail du collaborateur. Ces conditions doivent tenir compte du temps et des moyens effectifs nécessaires au traitement de la clientèle personnelle du collaborateur libéral.
Les modalités de rémunération et de remboursement des frais professionnels engagés pour le cabinet
Il est rappelé si le principe de la fixation de la rétrocession d’honoraires est libre, elle doit toutefois respecter les limitations suivantes :
- Pendant ses deux premières années d'exercice professionnel, l'avocat collaborateur libéral doit recevoir une rétrocession d'honoraires qui ne peut être inférieure au minimum fixé par le conseil de l'ordre du barreau dont il dépend.
- À partir de sa troisième année d’exercice professionnel, l’avocat collaborateur libéral doit recevoir une rétrocession d’honoraires qui ne peut être inférieure au minimum fixé pour la deuxième année d’exercice professionnel, par le conseil de l’ordre du barreau dont il dépend, sauf accord exprès et motivé des parties et après contrôle de l’ordre.
- Dans l’hypothèse où un collaborateur inscrit à un barreau conclut un contrat de collaboration libérale avec un cabinet inscrit à un autre barreau, il est fait application du minimum ordinal le plus élevé des barreaux concernés.
La clause de recours au bâtonnier comme conciliateur
L’article 14.2 du RIN prévoit que « le contrat de collaboration libérale doit obligatoirement comporter une clause de recours au bâtonnier, comme conciliateur. »
Néanmoins, cette disposition semble être d’adaptation assez souple, dans la mesure où le modèle du Barreau de Paris prévoit que « Tout différend né à l’occasion du présent contrat est soumis à la commission réglement des difficultés d’exercice en collaboration selon les modalités définies à l’article P 71.2 du Réglement intérieur du Barreau de Paris. A défaut de conciliation, il appartiendra à la partie la plus diligente de saisir la juridiction du bâtonnier conformément à l’article P. 71.5 du Règlement intérieur du barreau de Paris. »
La Cour de cassation a jugé que si les dispositions légales (Article 7 Loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et Art 142 Décret n°91-1197 du 27 novembre 1991) prévoient une conciliation préalable à l’arbitrage du bâtonnier, elles n’instaurent toutefois pas une procédure de conciliation obligatoire dont le non-respect serait sanctionné par une fin de non-recevoir (Cass. Civ. 1ère, 8 mars 2023, n° 22-10.679). Il semble néanmoins possible de conférer à la clause de conciliation un caractère préalable obligatoire qui serait sanctionné par une fin de non-recevoir.
Les conditions qui garantissent les droits du collaborateur
- le droit à la formation au titre de la formation continue et de l’acquisition d’une spécialisation notamment ;
- le secret professionnel et l'indépendance qu'implique le serment d'avocat ;
- la faculté de demander à être déchargé d'une mission contraire à sa conscience ;
- la possibilité pour l'avocat collaborateur libéral de constituer et de développer une clientèle personnelle, sans contrepartie financière, et les conditions dans lesquelles le collaborateur libéral peut satisfaire les besoins de sa clientèle personnelle ;
- le respect du principe de délicatesse dans l’usage des outils numériques.
Les conditions et les modalités de la rupture du contrat
Le contrat doit prévoir un délai de préavis.
Celui-ci est de trois mois, sous réserve des dispositions relatives à la rupture du contrat en cas de parentalité et sauf meilleur accord des parties.
Ce délai est augmenté d'un mois par année au-delà de trois ans de présence révolus, sans qu'il puisse excéder six mois.
Ces délais n'ont pas à être observés en cas de manquement grave flagrant aux règles professionnelles.
Le délai de prévenance est de huit jours en cas de rupture pendant la période d'essai.
Enfin, le contrat de collaboration doit indiquer les modalités de sa suspension afin de permettre au collaborateur de bénéficier des indemnisations prévues par la législation de la sécurité sociale en matière :
- d'assurance maladie ;
- de maternité ;
- de congé d'adoption ;
- de congé de paternité ;
- d'accueil de l'enfant.
Les clauses interdites en matière de collaboration
Le contrat de collaboration ne peut comporter de clauses :
- de renonciation par avance aux clauses obligatoires ;
- de limitation de liberté d'établissement ultérieure ;
- de limitation des obligations professionnelles en matière d'aide juridique ;
- de participation de l'avocat collaborateur libéral aux frais entraînés par le développement de sa clientèle personnelle pendant les cinq premières années d'exercice professionnel ;
- susceptibles de porter atteinte à l'indépendance que comporte le serment d'avocat ;
- qui limitent les obligations professionnelles en matière d’aide juridictionnelle et de commission d’office ;
- prévoyant une date de prise d’effet antérieure à la date de prestation de serment (pour un premier contrat de collaboration libérale ;
- privant l’avocate de sa liberté de choix concernant les modalités de répartition de son congé maternité (sous réserve des minima fixés par l’article 14.5.1 du RIN).
De manière générale, les clauses abusives, en vertu du droit commun des contrats, sont également interdites.
Exemples
- une clause qui constate l'adhésion du collaborateur à des clauses qui ne figurent pas dans l'écrit qu'il accepte ou qui sont reprises dans un autre document dont il n'a pas eu connaissance avant la conclusion du contrat de collaboration libérale.
- une clause qui supprime ou réduit le droit à réparation du collaborateur en cas de manquement par le cabinet à l’une de ses obligations.
Les clauses facultatives
Certaines clauses peuvent être insérées dans le contrat pour anticiper toute difficulté dans l’exécution du contrat de collaboration.
Les périodes de repos rémunérés
Concernant les périodes de repos rémunérés, le modèle du RIBP prévoit :
- la proratisation des périodes de repos rémunérés en cas d’arrivée en cours d’année ;
- la détermination au moins deux mois à l’avance des périodes de repos ;
- la limitation à trois semaines de repos d’affilée pendant les mois de juillet et août, et deux semaines d’affilée pendant les autres mois de l’année, sauf accord entre les parties.
En revanche, il ne prévoit pas les modalités de calcul des repos rémunérés et le sort des jours fériés dans les périodes de repos rémunérés.
En principe, la période de repos rémunérée s'entend en principe en semaines calendaires (par exemple d'un lundi matin à un dimanche soir), sauf meilleur accord des parties ou usage du cabinet.
Exemple d’usage
Cabinet qui décompterait alors la période en 5 x 5 jours ouvrés pour tenir compte d'un éventuel jour férié inclus dans l'un des 5 jours de ces 5 semaines.
Le modèle du Barreau de Paris est muet sur cette question.
La commission des Règles et usages a eu d’ailleurs l’occasion de rendre un avis du 2 octobre 2013 par lequel elle a considéré que :
« le fait pour un avocat de décompter à son collaborateur un jour férié comme un jour de repos rémunéré apparaît contraire aux principes de délicatesse et de confraternité visés à l'article 3 du décret du 12 juillet 2005 et repris à l'article 1.3 du Règlement intérieur national. »
Aussi, en matière de jours fériés, toutes les solutions sont admises pourvu que collaborateur et collaborant en aient convenu, dans le respect des règles de déontologie qui gouvernent leurs rapports. Il est donc conseillé de prévoir une clause à ce titre, correspondant aux usages du cabinet.
En pratique, beaucoup de cabinets ne décomptent pas les jours fériés dans les périodes de repos rémunérés.
Les autres clauses facultatives
Les frais professionnels
Le modèle du RIBP se contente d’indiquer que :
« le collaborateur recevra sans délai et sur justification le remboursement de tous frais professionnels, notamment de déplacement, exposés dans le cadre des missions confiées par le cabinet ou dans l’intérêt du cabinet ».
Il pourrait être utile de préciser davantage les conditions dans lesquelles le remboursement s’opèrera (mentions obligatoires sur les factures, délai dans lequel présenter les factures au cabinet, etc.)
La rémunération variable
S’il est possible d’en inclure une dans le cadre de négociations entourant un recrutement spécifique ou afin de favoriser sa marque employeur, il est préférable pour le cabinet de ne pas inclure de clause de rémunération variable ou que celle-ci soit la plus large possible afin que celle-ci puisse être entièrement discrétionnaire.
Il est également possible de prévoir une rémunération variable basée sur des objectifs, par exemple en termes d’heures effectuées, facturables ou facturées, ou encore sur un chiffre d’affaires à apporter. Il conviendra dans ce cas de rédiger la clause avec précision car, en cas d’inclusion de cette clause dans le contrat de travail, la modification de ladite clause requerra le consentement du collaborateur. Il est également possible de prévoir les objectifs par un avenant annuel ou que le contrat renvoie à une lettre d’objectifs dont la périodicité sera déterminée par les parties.
Le télétravail
Dans le cadre du développement d’une marque employeur, il peut être utile d’insérer une clause relative à l’organisation du télétravail.
Les modalités de répartition du temps entre le développement de la clientèle personnelle et la clientèle du cabinet
Il pourrait être envisageable de prévoir les modalités de répartition entre le temps consacré aux dossiers du cabinet et le temps consacré aux dossiers personnels.
Le cabinet devra prendre toutes ses précautions dans la rédaction de ces clauses afin de ne pas voir le contrat risquer de se faire requalifier en contrat de travail.
À titre d’exemple, le cabinet devra éviter de faire mention d’une quelconque autorisation de la part du cabinet pour pouvoir effectuer une audience personnelle et évoquer plutôt une information de la part du collaborateur au collaborant en vue de faciliter l’organisation du travail.
Le contrôle a priori du contrat de collaboration par le Conseil de l’Ordre
Le contrat de collaboration libérale ou salariée doit être transmis dans les quinze jours de sa signature pour contrôle au conseil de l'ordre du barreau auprès duquel l'avocat collaborateur libéral ou salarié est inscrit.
Il en est de même à l'occasion de tout avenant contenant novation ou modification du contrat.
Le conseil de l'ordre peut, dans un délai d'un mois, mettre en demeure les avocats de modifier la convention afin de la rendre conforme aux règles professionnelles.
Le contrat de collaboration inter-barreaux doit être transmis au conseil de l’ordre du barreau dont dépend le collaborateur.
Il est accompagné d’une attestation sur l’honneur du collaborant, qui certifie son inscription au barreau et l’absence de sanction susceptible de faire obstacle au recrutement du collaborateur.
Après validation par son conseil de l’ordre, le bâtonnier dont relève le collaborateur transmet le contrat et l’attestation au bâtonnier dont relève le collaborant.
Les formalités obligatoires relatives à la conclusion du contrat de collaboration
Le collaborateur doit être immatriculé en qualité de travailleur indépendant auprès de l’Urssaf et affilié au régime général de l’Assurance Maladie.
Concernant sa retraite, le collaborateur doit adhérer à la Caisse nationale des barreaux français (CNBF).
Il doit également s’occuper des formalités inhérentes à sa comptabilité et sa fiscalité, y compris la TVA.
Ces démarches sont effectuées par le collaborateur lui-même, et non par le cabinet.

