Dans l’exercice quotidien de leur métier, les avocats font face à des pics de stress si intenses qu'ils frôlent régulièrement leurs limites de tolérance. Plus le tabou du stress de l’avocat se lève, et plus l’étendue des dégâts qu’il cause sur sa santé mentale et physique, mais également sur la qualité et la quantité du travail qu’il produit ne cessent d’être découverte. Comment se manifeste le stress chez l’avocat, quelles sont ses sources, pourquoi les avocats ignorent qu’ils sont exposés à un type de stress particulièrement dangereux, et surtout comment gérer le stress de l’avocat au quotidien ? Voici les questions auxquelles je réponds pour vous dans cet article.
Qu’est-ce que le stress chez l’avocat ? Le stress est une fonction naturelle de notre organisme. Le Dr Hans Selye, médecin pionnier des études scientifiques sur le stress, le définit comme « l’ensemble des moyens physiologiques et psychologiques mis en œuvre par une personne pour s’adapter à un événement donné ».
La fonction première du stress est donc de permettre à l’être humain de s’adapter à son environnement. Le stress n’est pas dangereux par nature. Il le devient seulement lorsqu’il est permanent : on parle alors de stress chronique, qui est malheureusement fréquent chez les avocats puisque 81% d’entre eux ressentent régulièrement du stress ou de l’anxiété (source : Santé des avocats et des avocates du Barreau de Paris , Barreau de Paris et Toluna Harris Interactive, 2025, sur +2700 avocats parisiens).
Quelles sont les sources de stress pour les avocats ? Bien qu’elles puissent varier d’un avocat à un autre, voici les 10 principales sources de stress pour les avocats (source Pamplemousse Magazine ) et le pourcentage d’avocats qui constate chacune de ces sources de stress au quotidien :
La disponibilité immédiate requise : citée par 43% des avocats Les horaires de travail/le rythme exigeant : 41% La technicité des dossiers : 37% La conciliation vie personnelle, vie professionnelle : 35% Le management : 35% Le harcèlement/comportement toxique de la part des collègues/managers : 21% Les objectifs élevés de facturation : 19% Le manque de libertés : 17% L’insécurité de l’emploi : 16% L’ambiance de travail au cabinet : 16 % Fig. 1 : Les 7 principaux facteurs de stress chez les avocats. Source : Pamplemousse Magazine (2023), étude menée auprès de plus de 1000 avocats.
Au-delà des pressions directes liées à l'exercice du métier, les avocats font face à une forme de stress particulière et souvent méconnue : le stress vicariant. Cette forme d'usure psychologique mérite une attention particulière tant ses conséquences peuvent être insidieuses et durables.
Focus sur le stress vicariant des avocats Le stress vicariant constitue le stress chronique ou le traumatisme apparu chez un avocat « contaminé » par le vécu traumatique d’une autre personne avec laquelle il est en contact. Cela est notamment le cas pour les avocats spécialisés en réparation du dommage corporel, en pénal côté victime, en droit de la famille, en droit du travail, en sinistres immobiliers… Cette liste n’est pas exhaustive et peut inclure de nombreuses autres spécialités d’avocat.
Ce mécanisme peut également être observé chez des avocats qui ne sont pas en lien avec des personnes ayant vécu des traumatismes. Travailler au quotidien avec des clients et des interlocuteurs stressés, exigeants voire agressifs peut générer un stress vicariant.
Le stress vicariant des avocats a été étudié en 2003 par Levin et Greisber ( Levin, A. P., & Greisberg, S. (2003). Vicarious trauma in attorneys. Pace Law Review, 24, 245-252 .) , en voici les principales conclusions :
Les avocats ont démontré des niveaux significativement plus élevés de stress traumatique secondaire et d'épuisement professionnel comparés aux prestataires de soins de santé mentale et aux travailleurs des services sociaux.
Pourquoi ?
De nombreux clients traumatisés : plus d’1 avocat sur 2 a pris en charge 21 clients ou plus sur l’année, quand 70% des autres professionnels en ont géré 20 ou moins L’absence de supervision ou d’analyse des pratiques professionnelles chez les avocats Les auteurs affirment qu’il est primordial de sensibiliser et de former les avocats aux effets de la prise en charge de personnes traumatisées.
À quels risques psychosociaux sont exposés les avocats ? Dans un tel contexte les avocats sont exposés à des risques psychosociaux spécifiques. Une étude récente menée au sein d'un barreau français nous éclaire sur l'ampleur de ces risques et leur nature précise.
Maître Karim Berbra, avocat au Barreau de Rouen a mené une étude en 2024 pour répondre à cette question. Plus de 44% de ses confrères et consœurs rouennais ont répondu à son étude (+230 avocats). Les résultats nous permettent d’identifier les 10 principaux risques psychosociaux de l’exercice de la profession d’avocat :
La responsabilité liée à la réglementation de la profession Les demandes émotionnelles La pression professionnelle La surcharge de travail quantitative et qualitative Les objectifs d'heures facturables L'impact de la technologie et la difficulté à déconnecter L'insécurité de l'emploi L'insécurité financière L’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle Quelles sont les conséquences du stress sur le travail des avocats ? Le stress n'est pas néfaste par essence : il peut même, dans certains cas, être un moteur de performance. Cependant, la frontière entre le stress moteur et le stress délétère est souvent ténue dans la profession d'avocat. Comprendre cette distinction est essentiel pour préserver votre efficacité professionnelle.
Lorsque le stress de l’avocat est passager, il peut avoir un impact favorable sur son exercice professionnel. On parle alors de « bon stress » ou « eustress », comparable au trac ou à l’excitation ressentie avant une audience ou un closing. Ce type précis de stress se présente sous la forme d’une stimulation qui s’accompagne de sensations de satisfaction et d’accomplissement.
En revanche, lorsque le stress devient chronique, il demande davantage d’énergie à l’avocat qu’il ne lui est possible d’en produire. Il s’agit de « distress », un stress qui provoque des sentiments de peur, d’anxiété ou d’impuissance. Ce type de stress n’est plus stimulant (ou bien l’est trop) et commence à nuire à l’avocat. Lorsqu’il est vécu sur une longue durée, il peut donner l’impression à l’avocat de se sentir accablé par le travail.
Exercer la profession d’avocat avec des sentiments de panique, d’angoisse et de découragement est particulièrement inconfortable et peut détériorer la qualité et la quantité de travail produit par l’avocat : perte de temps, doutes, procrastination ou précrastination, difficultés à trancher…
Quelles sont les conséquences du stress sur la santé mentale des avocats ? Au-delà de l'impact sur la performance professionnelle, le stress chronique peut avoir des conséquences graves sur la santé mentale des avocats. L'épuisement professionnel guette celles et ceux soumis à une pression constante, avec des manifestations qui dépassent largement le cadre du simple surmenage.
Le stress chronique peut générer chez l’avocat un état de fatigue physique, émotionnel et mental extrême qui résulte d'un investissement prolongé dans des situations de travail exigeantes sur le plan émotionnel.
Il s’agit alors d’un syndrome d’épuisement professionnel (ou burn-out), caractérisé par trois dimensions (source INRS, ANACT, ministère du Travail , 2015) :
L'épuisement émotionnel : une fatigue extrême due à une exposition continue à des facteurs de risque pour la santé mentale Le cynisme vis-à-vis du travail : une attitude de l’avocat qui devient négative, dure et détachée de ses clients et de son travail. Ce symptôme est tabou, alors qu’il s’agit d’une conséquence de l’épuisement professionnel et pas d’un manque de professionnalisme de l’avocat La diminution de l'accomplissement personnel au travail : la sensation de ne plus s’épanouir au travail, une dévalorisation de soi, le sentiment d'être inefficace et de ne pas être à la hauteur de sa fonction. Le syndrome d'épuisement professionnel peut se traduire par des manifestations :
émotionnelles : peurs, tensions nerveuses, humeur triste… physiques : troubles du sommeil, fatigue chronique, douleurs musculaires… cognitives : difficultés de concentration, erreurs… comportementales ou interpersonnelles : repli sur soi, agressivité, désinvestissement professionnel… Ce syndrome peut lui-même évoluer vers une dépression, un trouble anxieux et d’autres pathologies physiques et/ou psychiques venant détériorer la santé de l’avocat et mettant en péril son exercice professionnel.
Comment gérer le stress lorsque l’on est avocat ? Le constat est très préoccupant mais des solutions efficaces existent. La profession commence à prendre conscience de l'ampleur des dégâts du stress de l’avocat, et des initiatives institutionnelles émergent. Parallèlement, des approches individuelles et collectives peuvent être mises en place pour mieux gérer ce stress professionnel.
Le Conseil National des Barreaux a adopté la résolution « Bien-être avocat et bien-être de l’avocat : vers un nouveau paradigme » en décembre 2023 qui « identifie des facteurs de risques pour la profession (le stress accru, la sinistralité croissante, les difficultés de management, l’isolement, l’insécurité financière) » et « propose plusieurs recommandations concrètes visant à améliorer le bien-être et à renforcer l’attractivité de la profession, notamment par des actions :
de formation de communication de sensibilisation et la création et le développement de dispositifs de détection de « signaux faibles » et de réseaux d’aide et d’entraide. » En cohérence avec ces recommandations, voici ce que je propose en priorité aux cabinets d’avocats et avocats que j’accompagne sur la régulation du stress professionnel d’avocat :
Avoir connaissance de son propre niveau de stress et du niveau de stress de ses équipes par des échanges réguliers, une mesure biannuelle des scores d’épuisement professionnel et un accompagnement individuel des avocats Sensibiliser les équipes aux risques encourus par le stress chronique, mettre en place des actions de prévention du stress et des risques psychosociaux et outiller les avocats à savoir réguler leur stress eux-mêmes : séances de sophrologie , groupes de soutien, analyse des pratiques professionnelles, supervision… Former les avocats à la gestion du stress professionnel et aux soft-skills en général : gestion du stress de l’avocat, intelligence émotionnelle, confiance en soi, intelligence relationnelle et communicationDeux avocats témoignent pour vous des bénéfices de ces actions dans leur exercice quotidien Témoignage de Maître Marie B. qui s’est formée à la gestion du stress professionnel de l’avocat à mes côtés : « J’ai suivi, avec des confrères, une formation à la gestion du stress de l’avocat et ai découvert la sophrologie à cette occasion. La pratique que nous fait découvrir Anaïs est très pertinente. Son propos est juste, très agréable et porteur. Beaucoup de bienveillance. J’ai apprécié également ses présentations plus théoriques, qui permettent d’intellectualiser, de mettre des mots et de comprendre comment nous fonctionnons, et donc, ce que nous pouvons « corriger ». Les outils qu’elle nous remet peuvent être utilisés très simplement par la suite. »
Témoignage de Maître Dorian J., avocat associé, qui fait intervenir Anaïs dans son cabinet d’avocats depuis 2021 : « Anaïs Garcia a conduit un dispositif de sophrologie au sein de notre cabinet d’avocats dont les bienfaits ont été unanimement soulignés par les participants. Son professionnalisme, son écoute, sa délicatesse et son sens de la pédagogie ont été grandement appréciés. Le bien être des équipes a été significativement amélioré par les outils transmis par Anaïs. »
Pourquoi développer ses soft-skills lorsque l’on est avocat ? Au-delà des compétences techniques qui font l'excellence de l'avocat, les compétences relationnelles et émotionnelles, appelées aussi soft-skills ou compétences psychosociales, s'avèrent être un levier essentiel non seulement pour gérer le stress mais aussi pour améliorer l'efficacité professionnelle globale. Investir dans ces compétences constitue désormais un atout concurrentiel majeur.
D’après Santé Publique France , « les compétences psychosociales ou soft-skills sont un ensemble de compétences sociales, émotionnelles et cognitives qui ont pour objectif d’améliorer les relations à soi et aux autres. » .
En améliorant sa relation à lui-même, l’avocat se connaît mieux, est capable d’identifier ses forces et ses points de progression, il peut évaluer son niveau de stress et mettre en place des techniques pour le réguler.
En améliorant sa relation aux autres, l’avocat simplifie tous ses échanges, il évite, désamorce ou résout facilement ses conflits et il est beaucoup moins impacté négativement par les souffrances de ses clients ou les violences auxquelles il est confronté.
Développer ses compétences psychosociales lorsque l’on est avocat , permet à la fois de réaliser son travail de manière plus efficiente (mieux travailler) mais également de se sentir mieux dans l’exercice de sa fonction (mieux vivre son travail).
Vous souhaitez approfondir ces questions et découvrir des solutions de gestion du stress pour avocat ? Le stress professionnel ne doit pas être une fatalité pour les avocats. Consultez anaisgarcia.fr pour découvrir les programmes sur-mesure d'accompagnement et de formation pour les avocats et cabinets qui souhaitent améliorer leur bien-être professionnel et leur performance.
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Anaïs GARCIA est sophrologue et formatrice en soft-skills pour avocats . Elle accompagne depuis 2019 des avocats dans toute la France (individuellement, en formation et en intervenant dans leurs cabinets) pour leur permettre de développer leurs compétences psychosociales et ainsi contribuer à un exercice professionnel plus impactant et plus épanouissant.
Contact : 06 12 36 32 10 contact@anaisgarcia.fr